15. Deuxième chaudron : l’Athanor
Rien à perte de vue.
En fait de « banlieue », c’était la province lointaine. À deux cents kilomètres de la capitale dans une zone désertique. On y parvenait par un chemin de terre poussiéreux fendant une zone surélevée avant de révéler une plaine nue et sèche, légèrement en creux. Une fois au fond de cette cuvette naturelle, on se sentait loin de tout, la plus proche habitation étant située à plusieurs dizaines de kilomètres.
Yves Kramer et Gabriel Mac Namarra roulaient dans une grande limousine dorée. Le milliardaire fit signe au chauffeur de parcourir tous les bâtiments pour expliquer à l’ingénieur ce qu’il avait préparé. Il sortit un petit schéma.
L’ensemble du centre « Dernier Espoir » avait la forme d’un « T ».
Il y avait dans le bras droit du T une partie « Recherche et Gestion », des bureaux et des hangars, une grande bâtisse avec un panneau CONSTRUCTION.
Au bout du bras gauche la zone « Habitation et Loisirs » se révélait un vrai petit village avec des villas individuelles, une place principale, un restaurant, des terrains et des salles de sport.
Enfin, au bout du pied du T un immense terrain identifié par sa pancarte : COSMODROME. Une aire de lancement de fusée ainsi qu’un bâtiment CONTRÔLE DE TIR.
Sur le côté plusieurs hangars et bâtisses devaient servir à stocker des pièces de construction et des citernes de combustible.
Gabriel Mac Namarra fit signe au chauffeur de stopper. Lorsque la poussière fut retombée ils sortirent.
— Ça vous plaît, Yves ?
Derrière eux, les bus avec les 88 autres membres du projet « D.E. » se garaient dans une zone de parking.
— Où sommes-nous ?
Gabriel sortit un cigare, le décapita du bout des dents puis cracha par terre.
— Officiellement, il s’agit d’un club d’amateurs de lancement de fusées pour les loisirs des employés de mes usines.
L’ingénieur repéra les antennes du radiotélescope, le dôme de l’observatoire, les radars.
— Ici au moins vous aurez de la place, et vous pourrez travailler au calme, ajouta simplement le milliardaire.
Déjà les autres ingénieurs se déployaient avec leurs valises tels des touristes dans un club de vacances. Comme il faisait beau ils sortirent leurs lunettes de soleil.
Satine commençait à faire l’appel et chacun recevait les clefs de sa villa personnelle.
Yves Kramer respira l’air du désert. Il avait le pressentiment qu’ici il se passerait des événements extraordinaires.